LES LIVRES D’ARCHITECTURE
Notice détaillée
Auteur(s) |
Kasemann, Rutger |
Titre |
Livre d’architecture... |
Adresse |
Paris, J. Messager, 1622 |
Localisation |
Paris, Ensba, Les 1256 |
Mots matière |
Ordres, Termes |
English
Le livre
est constitué d’une page de titre avec des armoiries suivie
de quatre pages de commentaires et de vingt-quatre gravures. La page
de titre et les gravures sont identiques à celles de l’édition
originale allemande, publiée à Cologne en 1616 sous le
titre SEILEN BOCHG Darin Gieziert Seilen Vnt Termen Sin. Nievlichg
An Dachg Giestelt Rotger Kaseman. Gietrvcket Bie Herman Schreiber.
Toutefois, quatre planches de cette édition manquent dans la
version française, et l’ordre des illustrations, avec des
signatures de A à BB, a été modifié. Il
est très possible que l’éditeur Herman Schreiber,
installé à Cologne, ait vendu le matériel gravé
à son collègue parisien Jean Messager entre 1616 et 1622.
L’auteur
allemand Rutger Kasemann, Roger Kaseman en français, est né
vers 1589 et mort après 1645. Dans son introduction il renvoie
aux précédents de la Rome antique et de villes telles
Cologne et Anvers, où il voit encore présents des «
modèles et patrons » de l’architecture des anciens.
Il affirme qu’il va représenter les « pedestaux,
thermes, bases, colomnes, chapiteaux, frises, cornices, balustres &
autres pieces » de chacun des ordres de colonnes ; mais il ne
le fait pas de façon systématique. Il prétend aussi
appliquer le principe vitruvien de diminution du fût des colonnes,
de manière à les rendre plus étroites dans leur
partie supérieure. Ainsi, la première planche montre l’ordre
toscan. Les proportions entre les différents éléments
sont indiquées avec des unités de mesure simples ; le système
et le module sont empruntés à Hans Blum : ce dernier,
dans son ouvrage Von den fünff Sülen Gruntlicher Bericht
(Zurich, 1550), utilise un système de mesures fondé sur
la division de la hauteur du piédestal toscan en six parties
égales. A l’instar de Blum, Kaseman reprend la hauteur
du piédestal diminuée de deux unités pour la base
et son astragale. À partir de cette mesure, il dessine un carré
à l’intérieur duquel est tracé un cercle
contenant lui-même un carré. Le côté de ce
dernier carré est égal à la dimension du diamètre
inférieur de la colonne, et, multiplié par six, il donne
la mesure de sa hauteur. Dans la partie gauche de cette page, Kasemann
donne un exemple de superposition dans lequel, comme Vitruve et Blum,
il diminue d’un quart la hauteur de l’ordre supérieur.
Dans les feuillets suivants, les méthodes de construction des
ordres dorique, ionique, corinthien et composite sont adaptées
de façon à affiner progressivement leurs proportions.
Sur une même page des exemples de colonnes avec et sans base sont
dessinés l’un sur l’autre. On voit aussi des variantes
de décor du fût pour l’ordre ionique, avec des tambours
ou avec des cannelures. Les planches suivantes offrent plusieurs variations
très élaborées sur les fûts et les chapiteaux
de chaque ordre. La planche E montre les ordres dorique, ionique et
corinthien traités avec des ornements très abondants.
Le fût dorique est chargé d’armes et de trophées,
ce qui concorde avec son caractère initial utilitaire ; l’ionique
est plus élégant, avec des volutes en forme de C et de
S entrelacées ; le corinthien, avec ses décors de fleurs
et ses motifs de parterres sur le fût, prédispose au repos
et à la détente. Les planches qui suivent s’attachent
successivement aux ornements de frises, de chapiteaux et de corniches.
Particulièrement remarquable est l’emploi de formes s’enroulant
vers le haut pour le corinthien et le composite. Kasemann accorde une
telle importance aux « balustres » (en fait des consoles
très hautes et saillantes), tant comme ornement du fût
des colonnes que comme motif indépendant, qu’il leur consacre
six planches. Leurs fûts sont très élaborés.
L’auteur s’intéresse aussi beaucoup à la représentation
des termes, délirants parfois, et dont l’image en perspective
est parfois partielle du fait de leur complexité. Seuls deux
exemples de termes présentent en guise de chapiteaux des bustes
féminins. L’emploi de fréquents ressauts dans les
termes a pour conséquence de donner une importance considérable
à leur partie supérieure, de sorte que le chapiteau proprement
dit devient un ornement secondaire, et que l’ensemble de la composition
perd une grande part de son harmonie - d’autant plus que le graveur
ne parvient pas toujours à représenter correctement en
perspective ces structures aussi complexes.
L’ouvrage
se situe clairement dans le style des traités d’architecture
germaniques de la seconde moitié du XVIe siècle et de
la première partie du siècle suivant. Ces publications
tendent à s’affranchir de l’influence italienne des
Vitruve, Alberti et Serlio et de leurs traducteurs, par exemple Walther
Ryff (1548) et Pieter Coecke d’Alost (à partir de 1542).
Inaugurée par le livre de Hans Blum en 1550, cette veine allemande
fut illustrée par les nombreuses publications de Wendel I Dietterlin,
Veit Eck, Johann Jacob Ebelmann, Jacob Guckeisen, Gabriel Krammer, Daniel
II Mayer et Johan Georg Erasmus. Roger Kasemann s’insère
parfaitement dans cette tradition en reprenant la théorie des
ordres telle qu’elle fut exprimée par Blum, et surtout
en accordant une grande importance au décor des ordres et à
l’ornementation exubérante des termes. Le propos de ces
traités est de diffuser le vocabulaire des ordres auprès
d’un vaste public de maçons et d’ouvriers, de sculpteurs
et d’ornemanistes, en leur procurant un grand nombre de modèles
pour chacun des éléments des ordres, en même temps
que des schémas de proportions géométriques simples.
Du point de vue stylistique et ornemental, ils s’inspirent très
largement d’auteurs contemporains tels que Dietterlin, Vredeman
de Vries, Mayer et Krammer. L’utilisation de motifs
en pointe de diamants sur plusieurs modèles peut certainement
trouver son origine dans les décors alors fort en vogue chez
les menuisiers et fabricants de meubles.
On ne connaît
que peu d’œuvres attribuables à Kasemann. Toutes sont
publiées à Cologne, à l’exception de la présente
traduction française qui fut imprimée à Paris.
Un ouvrage intitulé Architectura parut en 1615 et à
nouveau en 1643. Le Seilen Bochg date de 1616, et sa traduction
française de 1622. Kasemann publia le livre des colonnes de Blum
en 1625 sous le titre Architecture ; il fut réédité
en 1644 et 1664. En 1627 fut publiée une gravure représentant
les cinq ordres, et le traité intitulé Architectvr,
gravé par Hermanus Esser et doté d’une longue introduction,
sortit des presses en 1630 ; ce livre fut régulièrement
réédité durant le XVIIe siècle.
Piet Lombaerde (Hoger Instituut voor Architectuurwetenschappen
Henry van de Velde, Association Université Anvers ) - 2006
Bibliographie critique
U.-C. Bergemann, Die Meisterrisse der Ingolstädter Schreiner
1617-1742, Ingolstadt, Verlag Donau Courier, 1999, p. 85-87.
H. Günther, Deutsche Architekturtheorie zwischen
Gotik und Renaissance, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft,
1988.
G. Irmscher, Kölner Architektur- und Säulenbücher
um 1600, Bonn, Bouvier Verlag, 1999.
E. von May, Hans Blum von Lohr am Main. Ein Bautheoretiker der
Deutschen Renaissance, Strasbourg, Heitz/Mündel, 1910, p. 71-72.
U. Thieme & F. Becker (éd.), Allgemeines Lexicon der bildenden
Künstler von der Antike bis zur Gegenwart, « Kasemann
(Kaesmann, Kasmann, Kosmann) Rutger », Leipzig, Engelmann, 19,
1926, p. 581.
P.S. Zimmermann, « Hans Vredeman de Vries und die Folgen in der
Architekturlehre », H. Borggrefe & V. Lüpkes (éd.), Hans Vredeman de Vries und die Folgen, Marburg, Jonas,
2005, p. 91-100.
Notice
Livre d’architecture contenant plusieurs beaux ornementz, colonnes,
frises cornices, thermes balustre et autres pieces appartenant audict
art : Curieusement recherche et pourtraict sur les plus rares antiques
tant de Rome que de Cologne et autres lieux ou larchitecture a le plus
flory / par Roger Kaseman, Aleman. - A Paris : chez Jean Messager, 1622.
Page de titre - 4 pages de texte -[24] pages de planches gravées
numérotées A-Z (sans P) AA BB ; 26,3 x 17,3 cm.
Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts, Les 1256.
*Notes :
- Reliure de maroquin rouge frappée à l’emblème
de Joseph Le Soufaché, avec double filet d’encadrement
et fleuron aux angles, et triple filet extérieur, signée
Belz-Nied.
- Legs de l’architecte Joseph Le Soufaché à l’École
des Beaux-Arts, 1883.
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