LES LIVRES D’ARCHITECTURE

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     Le theatre de l’art de charpentier (1627) est indéniablement celui des trois traités de Mathurin Jousse qui eut le plus de succès : il fut à nouveau publié en 1650, 1659 et en 1664. Encore au XVIII^e siècle, il reste inégalé, comme l’affirme Thomas Moette dans l’« Avertissement » de son édition de 1702 (« il n’y avoit que Jousse qui en eût donné des Regles par écrit où l’on pouvoit en avoir une parfaite connoissance et l’étudier en particulier ; on recherchoit son Livre avec empressement »). L’édition parisienne est corrigée et augmentée par l’astronome et mathématicien Gabriel-Philippe de La Hire, fils de Philippe de La Hire. Moette, qui a racheté en 1699 aux filles et héritières de Françoise Griveau le privilège accordé à leur mère le 1^er juillet 1692 pour quinze ans, apparemment avec les planches (« toutes les planches qui ont été bien conservées m’étant tombées entre les mains »), reprend l’ouvrage complet avec l’« Abrégé des cinq ordres des colonnes ». Il publie l’ensemble avec les ajouts de La Hire sous le titre plus encyclopédique, L’art de charpenterie.
G.-P. de La Hire insère au début du traité de Jousse (entre les pages 4 et 5 de l’exemplaire mis en ligne) cinq planches gravées en taille-douce. Les trois premières qui illustrent les outils et machines utilisés par le charpentier (p. 2-4), sont reprises des gravures publiées par André Félibien dans ses Principes de l’architecture (1676, I, 14, p. 135, 137, 139, 141, 143). Pour la quatrième planche, le mathématicien emprunte au Cours d’architecture de François Blondel (1683, Cinquième partie, I, 7, p. 645) le pont (pont de Scamozzi) représenté dans la partie supérieure ; la façade avec la coupe du comble d’une maison à pans de bois vient à nouveau de Félibien (p. 131). Toutes ces gravures sont expliquées à la fin du volume (p. 190). Dans la cinquième planche consacrée aux combles, il réunit une planche de Félibien (p. 133) à deux schémas détaillés de comble à la Mansart extraits d’une planche du Cours d’architecture d’Augustin-Charles d’Aviler, intitulée « Diverses especes de combles avec leurs assemblages et couvertures » (1691, « Explication de la Charpenterie »). Tirant parti du grand format in-folio du traité de Jousse, de La Hire a réuni les éléments de plusieurs planches provenant d’ouvrages de format plus petit, voire de sources différentes. Comme il arrive souvent, les gravures sont inversées par rapport aux originaux. La Hire, proche du milieu des Académies – il succède à son père en 1718 à l’Académie des Sciences – s’est naturellement inspiré de Blondel, Félibien et d’Aviler dont les ouvrages à succès avaient connu plusieurs éditions peu après leur parution initiale.
Après le traité de Jousse et le bref traité des colonnes qui le suit traditionnellement, de la Hire ajoute « les descriptions et les figures de toutes les pieces qui entrent dans la construction des Pans de bois, avec la manière de faire le Toit brisé... et de quelques Ponts particuliers ». Le livre s’achève sur les moulins à vent et à eau : la mathématicien ajoute deux planches de son dessin.

Frédérique Lemerle (Cnrs, Cesr, Tours) – 2007

Bibliographie critique

F. Le Bœuf, « Mathurin Jousse, maître serrurier à La Flèche et théoricien d'architecture (vers 1575-1645) », In situ, 1, 2001.

P. Le Bœuf, « La Bibliothèque de Mathurin Jousse : une tentative de reconstitution », In situ, 1, 2001.

É. Pasquier & V. Dauphin, Imprimeurs et libraires de l’Anjou, Angers, Société anonyme des éditions de l’Ouest, 1932, p. 311-326.

É.-C. Pecquet, « Mathurin Jousse, architecte et ingénieur de la ville de La Flèche au XVII^e siècle », Cahiers Fléchois, 6, 1984, p. 28-41.

J.-M. Pérouse de Montclos, L’architecture à la française, XVI^e, XVII^e, XVIII^e siècles, Paris, Picard, 1982, p. 96-98.

R.-A. Weigert, Inventaire du Fonds Français. Graveurs du XVII^e siècle..., Paris, Bibliothèque nationale, 5, 1968, « Jousse (Mathurin) », p. 615-617.