LES LIVRES D’ARCHITECTURE

Notice détaillée

Auteur(s) Bachot, Ambroise
Titre Le timon...
Adresse Paris, A. Bachot, [1587]
Localisation Paris, Ensba, Masson 159
Mots matière Fortifications, Géométrie, Machines, Perspective

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     Ambroise Bachot est né dans le milieu des peintres et des métiers du livre. Son père, Louis Bachot, maître-peintre, habitait rue de Seine, faubourg Saint-Germain, au début des années 1540. Sa propriété jouxtait celle de Jean Cousin le père. Elle donnait sur la rue des Marais (rue Visconti) près de la rue de Seine. Sur les trois fils de Louis, Jean, maître-relieur, Laurent, maître peintre, et Ambroise, au moins ces deux derniers eurent pour résidence ce même logis durant toute leur vie. C’est à l’adresse de la Croix Blanche près de la rue de Seine que Bachot dit avoir imprimé en 1587 son premier livre, le Timon. Et lorsqu’en 1598 il publie à Melun chez le libraire Bruneval le Gouvernail on peut y lire qu’il « s’en trouvera aussi en son logis rue de seine... ». Sa veuve y habite toujours en 1616.
On ne connaît que peu de choses de la vie d’Ambroise Bachot. En 1571 il est auprès de l’ingénieur Agostino Ramelli, en 1573 ils sont au siège de La Rochelle, et en 1577 à Turin. Tout laisse penser que Bachot a rempli durant seize ans auprès de Ramelli, les fonctions de conducteur des dessins et qu’il est devenu « capitaine » puis ingénieur des fortifications en partant de cette formation première acquise probablement dans son milieu familial.
De 1579 à 1587 il grave les planches du Timon qu’il publie lui-même. Il s’annonce alors comme « le capitaine A. Bachot ». Il a épousé Hélène Bernard et ils ont en 1588 un fils, Jérôme, qui fera une belle carrière d’ingénieur et de commissaire aux fortifications de Bretagne, y prenant la suite de Charles Errard, père de son épouse Anne.
Pendant le siège de Paris, en 1590, Ambroise Bachot prend le parti de Henri IV, le suit à Melun et en 1593 se fixe dans la paroisse de Saint Ambroise. Il assure les fonction d’ingénieur des fortifications de la ville et en 1597 établit le plan d’un nouveau projet de fortification qui se trouve actuellement au musée de Melun. En 1598 il assure toujours les mêmes fonctions. En 1600 il est à Paris. Nous n’en savons pas davantage.
Les deux ouvrages très rares d’Ambroise Bachot sont donc aujourd’hui disponibles en ligne. Du Timon on ne connaît que trois exemplaires : celui de l’Ensba, numérisé ici, et un autre disponible à la bibliothèque Sainte-Geneviève (fol. V 341 inv 418 Res). On observe peu de différence entre eux. Ils comprennent le même nombre de pages (60 feuillets), et quelques rares inversions dans l’ordre des planches gravées. cependant l’exemplaire de la bibliothèque Sainte-Geneviève comprend en outre sept dessins de la fin du XVIe ou du début du XVIIe siècle et onze gravures tirées de l’Artillerie, c’est à dire Vraye instruction de l’artillerie et de toutes ses appartenances... de Diego Ufano (Rouen, 1628). Un troisième exemplaire se trouve à la Bayerische Staastbibliothek de Munich. D’après la description que Martha Gnudi en fait, il ne compte que 43 feuillets et ne comprend pas toute une partie consacrée à la perspective (deux encadrés de texte et douze de figures) ni quatre autres consacrées à la mesure à distance, qui se trouvent dans les exemplaires de Paris.
Le Timon a bénéficié d’une certaine notoriété dans l’historiographie récente à la suite de l’article de Martha Gnudi paru en 1974. Alors qu’elle travaillait à la traduction et la publication du plus célèbre des théâtres de machines, le Diverse et artificiose machine de Ramelli, intriguée par la dénonciation que l’auteur y fait du vol de ses dessins de fortifications par aucuns « domestiques » qu’il ne nomme pas, elle avait cherché le coupable et l’avait découvert dans Ambroise Bachot. Celui-ci, loin de dissimuler ce qu’il doit à Ramelli en fait longuement mention à trois reprises dans le Timon, louant ce « nouvel Archimède ». Ramelli dans sa préface note que « me donnant titre de vertueux, en apparence de me louer, & se louans eux-mesmes » ces « domestiques » lui « ont desrobé plusieurs dessseins particuliers, & adjoustans à iceux, & diminuant quelques inutiles parcelles, inventées de leurs folles fantaisies ; & en les courbans, ou en autre endroict les destournant pour couvrir leurs larrecins ».
Les arguments de Martha Gnudi sont assez convaincants et universellement repris. Le livre de Ramelli étant daté de 1588 et le Timon de 1587-89, il ne peut s’agir que de ce dernier ouvrage. Reste le pluriel des « domestiques » accusés. Or si dans le Gouvernail on peut voir certaines gravures signées de Laurent Bachot, ce n’est pas le cas du Timon. Les critiques faites à Bachot par Martha Gnudi sont très sévères, elles reprennent et appuient celles de Ramelli, ce qui lui fait manquer quelque chose d’essentiel : comme l’indiquent les titres de ses ouvrages, le propos de Bachot n’est pas celui de Ramelli. Le Timon « conduira le lecteur parmi les guerrieres mathematiques sur les réduction des unes aux autres figures geometriques et instruments de mesurer toutes distances et representer tout corps en perspective » ; de même le Gouvernail « conduira le curieux de Geometrie en perspective dedans l’architecture des fortifications, machine de guerre et plusieurs autres particularitez y contenues ». La raison d’être première de ces ouvrages concerne un ensemble de questions relatives à la représentation figurée d’inventions techniques. Il joint, dit-il, au Timon « un traicte fort utille des Fortifications Machines de guerre et aultres particularites inventes par l’auteur » : le larcin ne concerne que cette deuxième partie et, en effet, le style des dessins de machines est le même que dans les Diverse et artificiose machine, jusqu’au détail. Les planches sont simplement juxtaposées, sans aucune explication ni les déclarations des figures en usage dans les théâtres de machines. En revanche les textes de la première partie du Timon révèlent une approche originale, très différente de celle de Ramelli. Les réflexions de Bachot sur la méthode, sur la formation de l’idée, sur la place à accorder à la perspective, mais aussi sur l’utilité de la simulation sur modèle pour anticiper, comme sa conception du temps opportun, de l’occasion, inscrivent avec bonheur ses propos dans une tradition vivace à son époque.

Hélène Vérin (Cnrs, Centre Koyré, Paris) – 2006

Bibliographie critique

J. Guiffrey, Histoire générale de Paris, artistes parisiens du XVIe et du XVIIe siècles, Paris, Imprimerie nationale, 1915, p. 49.

G. Leroy, Melun sous Henri IV, Melun, Hérissé, 1866, p. 13.

G. Leroy, « Un ingénieur du roy au XVIe siècle », Almanach de Seine-et-Marne, Paris, 1873, p. 116-119.

P. Renouard, Imprimeurs et libraires parisiens du XVIe siècle, 2, Paris, Service des travaux historiques de la Ville de Paris, 1969, p. 3-6.

M. Teach Gnudi, « The cover design. Agostino Ramelli and Ambroise Bachot », Technology and culture, 15, 4, 1974, p. 614-625.

 

 

Notice

Le Timon du capitaine Ambroise Bachot le quel conduira le lecteur parmi les guerrieres mathematiques sur les reductions des unes aux aultres figures geometriques et instrumentz de mesurer toutes distances et representer tous corps en perspective Joinct un traicté fort utille des fortifications, machines de guerre et aultres particullarités inventés par l’auteur. - Imprimé à Paris au faubourg Sainct Germain des prés rue de Seine à la Croix blanche, [1587]. - Page de titre, dédicace au duc d’Épernon, adresse au lecteur (1 p.) puis alternance de feuillets comportant une seule planche, grande (comportant une illustration) ou petite (texte), et de feuillets regroupant 4 petites planches de texte, en tout sur 60 feuillets ; 33 x 23 cm. - Ouvrage entièrement gravé.
- Planche 57 datée « du moys d’aoust 1579 », planche 60 datée « 1583 ». Chaque planche porte la signature « Abachot ».
Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts, Masson 159.
*Notes :
- Reliure de parchemin portant des armes au centre des plats : croix des rois de Jérusalem, entourée d’une couronne de laurier ; aigle à chaque angle ; dos long alternant croix de Lorraine et double CC entrelacé.
- Legs de Jean Masson à l’École des Beaux-Arts, 1925.