LES LIVRES D’ARCHITECTURE

Notice détaillée

Auteur(s) Bernard, Jean
Titre Sauvegarde pour ceux qui craignent la fumée...
Adresse Dijon, C. Guyot, 1621
Localisation Besançon, Bibliothèque municipale, 247604
Mots matière Cheminées

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     Ce que l’on sait de Jean Bernard est principalement contenu dans son livre. L’« Extraict des Registres du Parlement », daté du 30 avril 1621, le désigne comme « Prestre, Chappelain en la Saincte Chappelle du Roy à Dijon ». Il se présente lui-même comme un homme qui, pour assurer sa charge d’économe, employé « en l’administration & gouvernement de [la] cellerie, à la recepte des vins », a acquis des connaissances dans l’« arpenterie », l’entretien et la réparation des bâtiments, grâce à l’étude de livres de géométrie et d’architecture. On apprend qu’il se délecte à la lecture des « bons Autheurs d’Architecture » et qu’il prépare des « principes d’Architecture », ou « conseil à ceux qui veullent bastir ». Mais la Sauvegarde pour ceux qui craignent la fumee, publiée par l’imprimeur dijonnais Claude Guyot, semble avoir été son seul livre.
Si Jean Bernard est le premier à publier en France un ouvrage spécifiquement dédié aux cheminées « fumeuses », il traite là une question commune à son époque qui, comme il le souligne lui-même, préoccupait plusieurs grands architectes. Il cite Philibert De l’Orme et ses soupiraux de fer blanc, « Serlio & les Italiens » qui coiffent leurs souches de « chapiteaux comme des lanternes » et les nouvelles souches dijonnaises « à la Capussine » percées de trous semblables à ceux des colombiers. Ce petit ouvrage de format (in-8°) n’est cependant pas un livre d’architecture « spécialisé », comparable à ceux qui se multiplient au début du XVIIIe siècle (Nicolas Gauger, La Mécanique du feu, 1713). Il se rattache plutôt aux livres « d’inventions » et à ce titre peut-être rapproché de la traduction de l’essai de François Kaeslar (Keslar), publiée deux ans auparavant à Oppenheim, par Jean-Thédodore de Bry (Epargne bois, c’est à dire, Nouvelle et par ci-devant non commune, ni mise en lumiere, invention de certains et divers fourneaux artificiels… maintenant publiée en François, 1619).
Dans son adresse au lecteur, Jean Bernard déclare vouloir « imiter les Medecins » en traitant d’abord des propriétés du feu et de la fumée puis du « remède » pour apporter « guerison aux malades ». Son « secret » tient « en trois mots » : construire des conduits de cheminée en forme d’entonnoir, plus larges en haut qu’en bas. Mais le livre n’est pas consacré qu’à la fumée. Comme de nombreux inventeurs, l’auteur propose plusieurs perfectionnements dérivés de sa règle : un tire-vin pour se garder des « valets & chambrières » amateurs de bon vin, un nouvel entonnoir pour faciliter « l’entonnage » des liqueurs et des huiles, et des tuyaux de descente, évidemment plus larges en bas qu’en haut. De nombreuses pages sont consacrées à montrer les fondements scientifiques de ses inventions. On y apprend que les organes des hommes – des narines aux parties sexuelles – fonctionnent selon le principe de ses nouvelles cheminées, que rien n’est vraiment jamais d’aplomb et de niveau, que la nature abhorre le vide, ou encore ce qu’il advient d’une balle tirée d’un mousquet pointé vers le haut.
Jean Bernard décrit les difficultés qu’il rencontre pour persuader les doctes et les ignorants : les « experiences & demonstrations oculaires […] palpables » nécessaires pour convaincre les premiers et les négociations pour obtenir des maçons la construction de murs en glacis, selon des règles, donc, contraires au principe de l’aplomb imposé par les « loix, statuts & ordonnances » des « privilèges de maistrise». C’est l’abolition des maîtrises en 1619 et 1620 qui l’aurait incité à publier son procédé mis au point en 1616.
Le livre, composé de 96 feuillets de texte sans illustration, n’est pas toujours clair dans ses parties descriptives, ce qui explique en partie, sans doute, sa diffusion limitée. Le Dictionnaire de bibliographie d’Étienne Psaume (1824) le signale comme rare. Si Jean Bernard est cité dans plusieurs dictionnaires et encyclopédies des arts et métiers, peu d’auteurs semblent en réalité avoir lu son texte. Seuls Louis Savot (L’architecture françoise des bastimens particuliers, 1624) et Pierre Hébrard (Caminologie ou traité des cheminées, 1756) rendent fidèlement compte de son invention. La plupart se bornent à copier une énumération que Savot fait de tous les procédés inventés depuis Vitruve pour empêcher les cheminées de fumer. Bernard y apparaît pour ses « molinets de fer blanc », un procédé dont il souligne pourtant les inconvénients. Le « complément » à son livre, publié en 1646 par Jean Valon, chanoine de la Sainte-Chapelle (Adjonction aux livres intitulés Sauve-Garde du Feu et de la Fumée, contenant un expédient pour empêcher que la fumée ne soit renvoyée par le vent, la pluye, la neige et la chaleur du soleil, Palliot, 1646), encore plus rare, n’a pu participer à le faire connaître.

Valérie Nègre (École d’architecture de Paris La Villette, Paris) – 2008

Bibliographie critique

M. H. Clément-Janin, Les imprimeurs et les libraires dans la Côte d’Or, Genève, Slatkine reprints, 1971, p. 20-24 (1ère éd. : Dijon, 1883).



 

 

Notice

Sauvegarde pour ceux qui craignent la fumée, et instruction pour faire cheminées neufves ; corriger les vieilles, pour eviter l’incommodité de la fumee, l’accident du feu et naissance de la suïe. Plus un traicté des entonnoirs [...] par [M.] Jean Bernard P[restre].
Dijon : Cl. Guyot, 1621. in-8º.
Besançon, Bibliothèque municipale, 247604.
*Note :
- Reliure parchemin.