LES LIVRES D’ARCHITECTURE
Auteur(s) |
Manesson Mallet, Allain [Alain] |
Titre |
Les travaux de Mars, ou la fortification nouvelle... |
Adresse |
Paris, J. Hénault & C. Barbin, 1671-1672 |
Localisation |
Paris, BnF, 8LK7 10183 (Gallica) |
Mots matière |
Fortifications, art militaire, urbanisme |
Consultation de l’ouvrage
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Transcription du texte
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English
Allain Manesson Mallet (1630-1706), mathématicien, géographe, cartographe, ingénieur militaire, dessinateur et architecte, était l’un des ingénieurs favoris de Vauban. Dans sa correspondance à Louvois, partiellement publiée par Albert Rochas d’Aiglun en 1902, Vauban écrit à son sujet en 1674 : « Pendant le voyage que je viens de faire, j’ai trouvé à la Rochelle un homme illustre et de grande réputation que je cherchais depuis longtemps (…). Il dessine très bien, entend fort bien la guerre et la fortification et écrit bien ». Manesson Mallet est en effet une figure marquante de son temps. A l’instar de Vauban, c’est un ingénieur aux multiples facettes dont l’abondante production révèle des intérêts très diversifiés. Son ouvrage majeur, Les travaux de Mars ou ll fortification nouvelle, dont la première édition paraît en 1671, figure parmi les best-sellers militaires les plus appréciés par les ingénieurs militaires européens à l’époque moderne. Il est ainsi cité de manière récurrente dans la plupart des inventaires de bibliothèques d’ingénieurs. Vauban en possédait un exemplaire dans sa bibliothèque du château de Bazoches ainsi que le prince de Ligne dans la bibliothèque du château de Belœil. Manesson Mallet est également l’auteur d’un imposant atlas géographique en cinq volumes intitulé Description de l’univers contenant les différents systèmes du monde (Paris, D. Thierry, 1683) et d’un ouvrage de géométrie pratique en quatre volumes (La géométrie pratique, Paris, Anisson, 1702).
Né à Paris en 1630, Allain Manesson Mallet est l’élève de Philippe Mallet, ingénieur militaire natif d’Abbeville, professeur de mathématiques à Paris à partir de 1654. Mallet est l’auteur de La Science des nombres ainsi que d’un curieux opuscule intitulé Estranges effets du tonnerre arrivés à Melun en 1656 avec les noms et qualités des morts et des blessez. Mallet a une influence marquante sur son élève qui note dans la préface de La Description de l’univers que le cours de mathématiques de son maître est devenu si rare qu’il a décidé de le rééditer (ce sera son dernier travail publié en 1702). Allain Manesson Mallet occupe par la suite la charge de « mousquetaire dans le régiment des gardes de Louis XIV » à Paris ce qui lui permet, dit-il, « d’apprendre dans cette belle école, les premières leçons qui m’ont donné des lumières pour écrire les Travaux de Mars ». C’est suite à cette expérience qu’il part en 1663 pour le Portugal servir le roi Alphonse VI. On connaît de cette période la série de plans de villes fortifiées de la province de l’Alentejo aujourd’hui conservées à la bibliothèque du SHAT à Vincennes. En 1668, à la fin du règne d’Alphonse VI, Manesson Mallet revient en France où « ayant rendu ses profonds respects à sa Majesté », il est nommé maître de mathématiques des pages de la petite écurie. Cette charge lui laisse enfin le temps, dit-il, de s’appliquer « à mettre au jour, en faveur de ma patrie, les observations que j’ai faites sur l’art militaire ».
C’est ainsi que trois ans après son retour, en 1671, Manesson Mallet publie la première édition des Travaux de Mars, dont le privilège royal est accordé pour sept ans. L’ouvrage est un petit in-octavo, divisé en deux grandes parties : une méthode de fortifier toutes sortes de places et différents modèles d’auteurs renommés en art militaire. Il présente, pour la première fois dans l’histoire des traités militaires, une rigoureuse alternance entre texte et figures. Chaque chapitre est divisé en courtes notices illustrées en regard par des planches qui permettent à Manesson Mallet « de voir au net les figures et les plans ce que qui est expliqué dans le discours qui les précède ». L’auteur relève également que les vues de villes qu'il a placées au bas de chaque planche « ont été gravées pour faire naître à la jeune noblesse le désir d’apprendre à dessiner, d’autant que dans la fortification, le dessin n’est pas seulement une bienséance cavalière mais encore une nécessité absolue ». Quoique l’auteur avoue que cette première édition est encore imparfaite, l’ouvrage obtient un succès immédiat. Il est diffusé chez les deux plus grands libraires. Le premier, Jean Hénault, éditeur libraire prisé chez les Jésuites, était également l’un des deux seuls imprimeurs parisiens à posséder ses propres presses. Le second, Claude Barbin, fils naturel de l’intendant des finances lié à Concini, était l’éditeur « des gens de goût ». Les versions pirates ne se font pas attendre : Les travaux de Mars sont notamment publiés en allemand l’année suivante.
Une seconde édition officielle voit le jour en 1684. Les deux dates de publication, 1671 et 1684, sont primordiales pour l’histoire de l’architecture militaire française. Lorsque Manesson Mallet rentre du Portugal l’édition militaire française s’est essoufflée. Après les ouvrages phares de la première moitié du siècle marquée par Jean Errard, Blaise de Pagan et Antoine de Ville, l’art militaire est devenu « une affaire de goût » pour la noblesse française et peu de travaux innovants sont mis sous presse. Les deux éditions des Travaux de Mars paraissent donc dans un contexte très particulier. Dans la première, l’auteur fraîchement rentré du Portugal, ne mentionne pas Vauban et fait continuellement référence à sa propre expérience à l’étranger. Le ton est résolument différent dans sa deuxième édition, enrichie de nombreuses références au maître.
Émilie d’Orgeix (Université Michel de Montaigne – Bordeaux 3) – 2011
Bibliographie critique
A. de Rochas d’Aiglun, Vauban. Sa famille et ses écrits. Ses oisivetés et sa correspondance, Genève, Slatkine, 1972, 2, p. 102.
É. d’Orgeix, « Alain Manesson Mallet (1630-1706) : portrait d’un ingénieur dans le sillage de Vauban », Bulletin du comité français de cartographie, 195, mars 2008, p. 64-74.
N. Kanas, Star Maps – History, Artistry, and Cartography, Berlin/Heidelberg/New York, Springer-Praxis, 2007, p. 197-199.
M. Mendillo, Celestial Images – Antiquarian Astonomical Charts and Maps from the Mendillo Collection, Boston, University of Washington Press, 2005, p. 83-84.
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