LES LIVRES D’ARCHITECTURE
Ce
recueil de gravures compte parmi les publications les plus précoces
de Jacques Androuet du Cerceau. Il a été composé
dans le contexte de l’avènement de Henri II et des nombreuses
entrées solennelles que le nouveau roi allait faire dans ses
villes. Lyon avait donné l’exemple en 1548, et, en 1549,
l’année même de la parution de l’ouvrage, c’est
Paris qui offrait au jeune monarque une mémorable cérémonie.
Les arcs de triomphe devenus indispensables au décorum de ces
fêtes, il était plus qu’opportun d’en proposer
des modèles. L’ouvrage donc se présente comme une
anthologie d’exempla, variations sur le thème
de l’arc de triomphe. De ce point de vue, il revêt une importance
considérable, que peu d’historiens de l’art ont remarquée.
En effet, en 1549, l’arc de triomphe vient à peine de faire
son apparition dans l’architecture française. Le frontispice
de l’aile principale d’Anet est encore en chantier, de même
que les avant-corps de la cour du Louvre; ceux d’Écouen
sont, au mieux, à l’état de projet. Mais de superbes
exemples, sans doute dessinés par Serlio, avaient embelli les
rues de Lyon en 1548, lors de l’entrée de Henri II. Et
l’année même de la parution du recueil d’Androuet
du Cerceau, Jean Martin et Jean Goujon préparaient pour les fêtes
parisiennes plusieurs arcs inspirés de modèles serliens.
L’arc à l’antique, par ses référents
symboliques, historiques et culturels, était ainsi consacré
comme le lieu commun par excellence d’une nouvelle architecture
qui aspire au plus haut niveau de l’expression, celui du sublime.
Or, 1549 est aussi l’année de la publication de la Défense
et Illustration de la langue française par Joachim du Bellay
; celle du premier livre des Odes de Ronsard est imminente.
La consécration du thème architectural va de pair avec
celle d’une nouvelle poésie, celle de la Pléiade,
dont l’ambition est la même : élever la littérature
française au niveau du grand style, celui des odes ou de l’épopée.
Avec une grande perspicacité, du Cerceau a senti l’évolution
de l’art de bâtir, et son petit recueil s’inscrit
parfaitement dans le grand mouvement de renouvellement qui bouleverse
l’architecture française dans les années cruciales
de l’avènement de Henri II. Yves Pauwels (Cesr, Tours) – 2007 Bibliographie critique
J. Androuet du Cerceau, Les plus excellents bastiments de France..., présentation et commentaires par D. Thomson, Paris, Sand & Conti, 1988 (chronologie documentaire et bibliographie générale p. 310-316). H. von Geymüller, Les Du Cerceau. Leur vie et leur œuvre d’après les nouvelles recherches, Paris/Londres, Rouam/Wood & Co, 1887. F. Lemerle, « Jacques Androuet du Cerceau et les antiquités », Journal de la Renaissance, 2, 2004, p. 135-144. Y. Pauwels, L’architecture au temps de la Pléiade, Paris, Monfort, 2002. Y. Pauwels, L’architecture et le livre en France à la Renaissance : « une magnifique décadence » ?, Paris, Garnier, 2013, p. 54-60. D. Thomson, Renaissance Architecture. Critics Patrons Luxury, Manchester/New York, Manchester UP, 1993. A. Turcat, Étienne Jamet alias Esteban Jamete, sculpteur
français de la Renaissance en Espagne condamné par l’Inquisition,
Paris, Picard, 1994.
Notice Jacobus Androuetius du Cerceau. Lectoribus. S. En vobis candidi lectores et architecturæ studiosi quinque et viginti exempla arcuum partim a me inventa, partim ex veterum sumpta monumentis tum Romae tum alibi etiam num extantibus : ut inscriptio sua oviusque arcus indicabit. Et quem admodum in antiquis arcubus easdem columnas, easdem coronas, eadem epistylia, eundemque ornatum secutus sum : ita a me excogitatos quam proxime ad antiquorum rationem et simmetriam juxta suum cuiusque genus expressi. Quo fit ut omnes ædificandi studiosi nullum in hoc libro genus arcuum desiderent. Hunc nostrum laborem et industriam adiuvandis vestris ingeniis dedicatam quæso boni consulite. – Aureliæ, 1549. Suite de [26] planches gravées à l’eau-forte, montées sur onglets, dont page de titre ; 342 x 244 mm. Certaines de ses planches sont d’un second état, avec reprise au burin. Texte du titre en latin gravé à l’eau-forte. Dimension moyenne des planches : 295 x 210 mm. Seule édition connue. Chaque planche représente une élévation d’un arc de triomphe, accompagné d’un petit plan au centre en bas, sans échelle, et porte un titre, toujours en français et gravé sur cuivre. Seules les inscriptions des tables de certains arcs de triomphe sont en latin. Berlin Katalog, I, 2351 ; Destailleur 1863 p. 33-34 ; Geymüller 1887 p. 48, 186-191 et 302, fig. 21 et 22 ; Avery Cat. 1895 p. 286 ; Inventaire du fonds français (XVIe siècle) I, p. 68-69. Paris, Bibliothèque de l’Inha, Collections Jacques Doucet, 4 Res 1475 *Notes : - Ouvrage précédé de l’édition allemande du Libro IV de Serlio (1542). - Reliure allemande du 16e siècle en vélin, plaque estampée à froid sur les plats à décor compartimenté de rinceaux, fleurs et médaillons. Date ‘1554’ et initiales ‘C.R.’ rehaussées à l’encre noire, traces de deux fermoirs, dos à 6 nerfs. Il s’agit très vraisemblablement d’un réemploi du 19e siècle destiné à relier en une seule unité les ouvrages de Serlio et d’Androuet du Cerceau. L’épaisseur de la reliure laisse penser qu’un troisième ouvrage venait en complément des deux précédents. Si tel était le cas, il a aujourd’hui disparu pour être remplacé par un cahier de 24 feuillets vierges (filigrane 1749). - Au verso du premier contreplat, étiquette impr. « E. Foulc » avec mention ms ‘Vente Foulc n° 16’. |