LES LIVRES D’ARCHITECTURE

Notice détaillée

Auteur(s)

Serlio, Sebastiano
Coecke, Pieter (traducteur)

Titre Des antiquités...
Adresse Anvers, P. Coecke, 1550
Localisation Paris, Ensba, Les 1744
Mots matière Édifices antiques

English

     Le peintre, entrepreneur et libraire de l’Empereur Pieter Coecke van Aelst, entreprit la publication des cinq livres de Sebastiano Serlio en français, néerlandais et allemand. Le Livre III parut en français à Anvers en 1550, l’année de sa mort. La traduction est fidèle à la version néerlandaise publiée en 1546, dont la mise en page diffère légèrement de celle des éditions italiennes (1540 et 1544), sans toutefois la préface de Coecke qui n’a pas été traduite. On trouve en effet réunis sur une même page les brefs commentaires et les illustrations du temple de Bacchus (Sainte-Constance) (f. 8v°), du temple de la Paix (f. 10) ou de la porte de Spello (f. 33v°), peut-être par souci de cohérence ou plus prosaïquement pour gagner quelques feuillets. L’ordre des monuments présentés du folio 36 au folio 51 ne respecte pas la présentation originale, créant même une certaine confusion : ainsi le Septizodium qui figurait dans l’édition italienne entre le temple de Sérapis sur le Quirinal et le port d’Ostie a été curieusement placé entre l’amphithéâtre de Vérone et celui de Pola. Les diverses unités de mesure utilisées dans les illustrations ont été ajoutées aux commentaires. Enfin l’adresse au lecteur sur laquelle s’achève l’ouvrage, qui faisait allusion à François Ier et à des mécènes français (Guillaume Pellicier, Georges d’Armagnac) a été logiquement retirée. Mais le développement sur les merveilles de l’Égypte, supprimé dans la version flamande de 1546, a été rétabli, et quelques erreurs de mesures ont été corrigées.
Les planches sont celles de la traduction néerlandaise, copies fidèles de l’édition italienne, même si les ombres et hachures sont parfois plus denses et accentuées. Seules les fleurs de lys qui couronnaient les monuments (Tempietto, projet de coupole de Bramante pour Saint-Pierre, projet de villa, etc.) ont été remplacées par l’aigle impérial bicéphale. Dans la version néerlandaise, Coecke avait pris la liberté d’ajouter aux arcs de triomphe véronais (Porta Leoni, arc des Gavii) la Porta dei Borsari, volontairement éliminée par Serlio pour son aspect « barbare ». Cette planche, qui présentait la moitié de l’élévation tirée de la gravure de Giovanni Caroto pour l’ouvrage de Torello Sarayna (De origine et amplitudine civitatis Veronæ, Vérone, 1540), a disparu dans la version française.
L’entreprise de traduction n’était point aisée : Coecke fut confronté au même problème linguistique que Jean Martin pour ses traductions des Livres I, II (1545) et V (1547) de Serlio. Comme pour le Livre IV qui en 1542 diffusait le vocabulaire vitruvien, il dut inventer un nouveau lexique qui rendît compte des monuments antiques et de leur décor. Ces luxueuses publications non autorisées par Serlio, dont le nom n’apparaît d’ailleurs jamais sur les frontispices, s’adressaient aux milieux humanistes déjà familiers de Vitruve et d’Alberti. Le Livre III, imprimé avec les caractères modernes de l’alphabet romain, apportait l’indispensable culture antique à tous ceux qui ne pouvaient faire le voyage d’Italie et connaître les plus belles antiquités d’Italie et hors d’Italie (Pola), ainsi que les réalisations majeures de la Rome de Jules II ajoutées par Serlio car dignes des plus beaux antiques : la villa de Poggio Reale, une suite de projets pour Saint-Pierre, le Belvédère et le Tempietto de Bramante à San Pietro in Montorio ou le projet de la villa Madame selon Raphaël. La traduction du Livre III suivit comme en Italie celle du Livre IV consacré précisément au décor architectural, fondé sur les cinq ordres d’architecture, qu’elle complétait avec un même souci d’efficacité. Les architectes y trouvaient matière à nourrir leurs projets. On sait le rôle que joua Serlio dans l’architecture d’Europe du Nord. Si le Livre IV avait imposé les règles du langage, le Livre III fournit un certain nombre de modèles, qui furent repris en particulier dans les Joyeuses Entrées que firent Charles Quint et le futur Philippe II à Gand et à Anvers en 1549, moins sans doute dans la réalité des structures provisoires montées lors des cérémonies que dans les livrets et les gravures publiés à l’occasion, qui, une fois évanoui le souvenir des fêtes, en restèrent les seuls témoignages et en diffusèrent les formes.

Frédérique Lemerle (Cnrs, Cesr, Tours) – 2011

Bibliographie critique

K. De Jonge, « Anticse Wercken : la découverte de l’architecture antique dans la pratique architecturale des anciens Pays-Bas. Livres de modèles et traités (1517-1599) », M.-C. Heck, F. Lemerle & Y. Pauwels (éd.), Théorie des arts et création artistique dans l’Europe du Nord du XVIe au début du XVIIe siècle, Lille, PUL, 2002, p. 55-74.

K. De Jonge, « L’édition de la traduction française du Livre III par Pieter Coecke van Aelst à Anvers en 1550 », S. Deswarte-Rosa (éd.), Sebastiano Serlio à Lyon. Architecture et imprimerie, Lyon, Mémoire Active, 2004, p. 283.

H. de la Fontaine Verwey, « Pieter Coecke van Aelst and the Publication of Serlio’s Book on Architecture », Quærendo, 6, 1976, p. 166-194.

W. Kuyper, The Triumphant Entry of Renaissance Architecture into the Netherlands. The Joyeuse Entrée of Philip of Spain into Antwerp in 1549, Renaissance and Manierism Architecture in the Low Countries from 1530 to 1630, Alphen aan den Rijn, Canaletto, 1994.

J. Offerhaus, « Pieter Coecke et l’introduction des traités d’architecture aux Pays-Bas », J. Guilaume (éd.), Les traités d’architecture de la Renaissance, Paris, Picard, 1988, p. 443-452.

Y. Pauwels, « Propagande architecturale et rhétorique du Sublime : Serlio et les “Joyeuses entrées” de 1549 », Gazette des Beaux-Arts, 137, mai-juin 2001, p. 221-236.

Y. Pauwels, « Fête, propagande et image imprimée : les “Joyeuses entrées” de Gand et d’Anvers (1549) », R. Crescenzo (éd.), Espaces de l’image, Nancy, 2002, Université de Nancy 2, p. 167-188.

Y. Pauwels, « L'introduction des ordres d'architecture dans les Pays-Bas : entre Italie et Espagne », R. Dekoninck (éd.), Relations artistiques entre l’Italie et les anciens Pays-Bas, XVIe-XVIIIe siècles. Bilan et perspectives, Bruxelles/Rome, Institut historique belge de Rome, 2012, p. 53-59.

M. Vène, Bibliographia Serliana. Catalogue des éditions imprimées des livres du traité d’architecture de Sebastiano Serlio (1537-1681), Paris, Picard, 2007, p. 75-76.


 

 

Notice

Des Antiquites, Le troisiesme liure translaté d’italien en franchois. - Imprimé en Anvers : Pour Pierre Coeck d’Alost, libraire iuré de l’Imperialle Maieste, par Gil. van Diest, 1550. - 73-[2] f. : ill. ; 37 x 25 cm.
Le frontispice ne porte aucune autre indication que le titre et une devise. La 1ère page de texte porte un autre titre.
Autre titre : « Le troisième livre de Sebastien Serlio B. : auquel sont figurez et descripts les Antiquitez de Rome, et aultres, estans tant es Itales que dehors, translaté de l’ytalien en franchois ».
L’adresse est prise en dernière page. La date est libellée : « En Lan de nostre Seigneur Mil cinq centz et cinquante, le vie iour de Iuillet. ».
Berlin Katalog 2562 ; Fowler 310 ; RIBA 2970.
Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts, Les 1744.
*Notes :
- 1/2 reliure moderne.
- Legs de l’architecte Joseph Le Soufaché à l’École des Beaux-Arts, 1890.