LES LIVRES D’ARCHITECTURE



Auteur(s) Vitruve
Caporali, Giovan Battista
Titre Architettura...
Adresse Pérouse, G. Bigazzini, 1536
Localisation Einsiedeln, Stiftung Bibliothek Werner Oechslin, A04d. app. 855
Mots matière Architecture
Transcription du texte

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Après l’édition vénitienne publiée à Venise par Francesco Luci (dit Durantino) en 1524 rééditée en 1535, parut à Pérouse en 1536 une traduction italienne de Vitruve commentée et illustrée (Architettura con il suo commento e figure Vetruvio in volgar lingua raportato). Son auteur est le peintre pérugin Giovan Battista Caporali (1476-1560). La dédicace au comte Giano Bigazzini datée de 1532, le privilège de Clément VII de 1533, le fait que l’édition se limite aux cinq premiers livres – ce que ne précise pas le titre –, l’absence enfin d’index et de table des matières révèlent que l’entreprise n’a pas été menée à son terme, malgré le rôle déterminant du mécène Bigazzini qui, après une carrière militaire, s’était retiré sur ses terres à Pérouse. Il ne semble avoir acquis un atelier typographique que pour l’édition du Vitruve de Caporali et une nouvelle édition des Cinque primi canti di Sacripante de Lodovico Dolce (un exemplaire est conservé à Londres au British Museum) déjà publiés à Venise en 1535 par Francesco Bindone et Maffeo Pasini.
Caporali, après avoir travaillé dans sa jeunesse avec Pérugin et Pinturicchio, s’était rendu à Rome où il fut en contact avec Bramante, Giuliano da Sangallo et Peruzzi : il évoque en effet dans son commentaire (IV, 7, f. 102) un dîner chez Bramante en compagnie de Pérugin, Signorelli et Pinturicchio. Ce séjour romain effectué probablement entre 1508 et 1509 fut déterminant dans sa formation d’architecte et de théoricien à l’époque où s’élaborait le nouveau langage à l’antique dans le cercle de Bramante et Raphaël. Pour son édition Caporali s’est appuyé sur le Vitruvio de Cesariano dont il reprit le type de mise en page inauguré en 1521 (traduction encadrée par le commentaire en caractères plus petits). Il en modernisa la langue par rapport aux éditions de Durantino, gommant définitivement le côté archaïque de l’édition de 1521 et dota l’ouvrage d’un frontispice « moderne » avec un arc de triomphe dorique à une baie, flanqué à gauche de son autoportrait. Il conserva les illustrations de 1521 qui furent toutefois regravées et réinterprétées. Malgré un trait plus fin pour certaines d’entre elles, les gravures sont de moindre qualité que les originales. Parfois elles ont été dissociées et font l’objet de deux gravures distinctes comme les caryatides (f. 8v°), ce qui permet à Caporali de développer le portique sur deux niveaux comme Cesariano l’avait fait pour l’illustration des Perses captifs, les détails de la partie inférieure de la planche originale étant reproduits dans la gravure suivante. De même, les gravures des folios 29 et 29v reprennent la planche 21 de l’édition de Côme. D’autres au contraire ont été réunies : ainsi la gravure du f. 34 associe-t-elle les illustrations de la tour des vents d’Athènes et de l’amussium (f. 24v°-25). Des schémas ont été ajoutés (f. 34v°et 35, 38v° [gauche], 41). Les planches de la cathédrale de Milan illustrant l’ichnographie, l’orthographie et la scénographie dans le Vitruvio de Côme ont été supprimées mais l’ichnographie et la scénographie ont été illustrées autrement en reprenant par exemple une illustration du livre IV (f. 19v°). Caporali a également rajouté de son chef deux gravures : la plus intéressante à la fin du chapitre 1 du livre IV, qui se distingue par une meilleure qualité graphique, donne à voir six chapiteaux corinthiens et composites, un toscan et une base corinthienne, tels que les codex contemporains en représentent des exemples. En l’état, l’édition partielle de 1536 est le dernier avatar du Vitruvio de 1521 en Italie. Comme son prédécesseur, Caporali voulut ancrer la théorie vitruvienne dans la pratique contemporaine et il put influencer son disciple Galeazzo Alessi dont il fut le premier maître. Daniele Barbaro le lut sans aucun doute.

Frédérique Lemerle (CNRS, Tours, CESR) – 2022

Bibliographie critique

F. Lemerle, « Le Vitruvio de 1521 dans la littérature vitruvienne », F. Lemerle, Y. Pauwels & V. Zara (dir.), Il Vitruvio di Cesare Cesariano (Como, 1521), à paraître.

L. Olivato, Galeazzo Alessi e la trattatistica architettonica del Rinascimento, Sagep, Genova, 1975, p. 31-140.

G. Poleni, Exercitationes Vitruvianae, Padova/Venezia, Manfrè / Pitteri, 1739, p. 37-39.

M. Tafuri, L’architettura del manierismo nel Cinquecento europeo, Roma, Officina Edizioni, 1966, p. 199.

M. Tafuri, « L’idea di architettura nella letteratura teorica del manierismo », Bolletino del Centro internazionale di studi di architettura A. Palladio, 9, 1967, p. 369-398.

G. Vasari, Le vite de’piu eccelenti architetti, pittori e scultori italiani…, Firenze, Giunti, 1568, p. 516.

G. B. Vermiglioli, Biografia degli scrittori perugini, I, Perugia, Bartelli, 1829, p. 271-273 (éd. fac-similé : Bologna, Forni, [1973]).

A. Venturi, Storia dell’arte italiana, Architettura del Cinquecento, XI, 1, Milano, Hoepli, 1938, p. 886-895.