LES LIVRES D’ARCHITECTURE

Notice détaillée

Auteur(s) Bullant, Jean
Titre Reigle generalle d’architecture...
Adresse Rouen, D. Ferrand, 1647
Localisation ETH-Bibliothek Zürich, RAR 88 fol.
Mots matière Antiquités, Ordres
Transcription du texte

English

     La dernière édition connue de la Reigle de Jean Bullant paraît en 1647, chez David II Ferrand, à Rouen. Issu d’une dynastie de libraires, ce personnage assez pittoresque – il eut à payer quelques amendes pour avoir composé et imprimé quelques pièces « lascives et déshonnêtes » – est surtout connu en Normandie comme l’auteur d’une Muse normande en « langage purin », c’est-à-dire en dialecte local.
On ne sait rien des circonstances qui l’ont amené à s’intéresser à l’architecture. Ce qui est sûr, c’est qu’il eut une politique très cohérente en matière de réédition de traités : « Lecteur bénévole, ayant découvert à Paris ce petit trésor caché depuis quatre-vingts années, & l’ayant en possession, je n’ai voulu te cacher ce talent, ainsi que ceux qui le possédaient entre leurs mains ; ains je lui ai voulu faire voir le jour, sachant qu’il y courait de l’intérêt public pour l’embellissement & structure des beaux bâtiments de France […]. Tu le recevras donc d’aussi bon cœur que je te le présente, espérant en bref remettre entre les mains les œuvres de Philibert de l’Orme (étant possesseur de toutes les figures qui sont en icelles, ainsi que du Vitruve) ». De fait, Ferrand a sans doute racheté le matériel des premiers éditeurs de Bullant, Marnef et Cavellat, peut-être aux héritiers de Regnault II Chaudière, qui avait probablement lui-même récupéré les richesses de la dynastie Cavellat : planches du Vitruve de 1572, des Bullant de 1568 et 1619 et du De l’Orme de 1626.
Quoi qu’il en soit, l’éditeur rouennais ne prend pas en compte l’édition de la Reigle publiée par Sittart en 1619. La version qu’il propose reprend de façon beaucoup plus fidèle, en particulier dans les pièces liminaires, celle de 1568. La dédicace au maréchal de Montmorency, désormais complètement obsolète, l’adresse et l’avertissement au lecteur sont, à quelques mots près, les mêmes. Il ne manque que le privilège original, évidemment inutile, remplacé par une adresse de Ferrand au lecteur. Le texte, recomposé, est très fidèle à celui de 1568, à quelques infimes détails près (par exemple, au folio [B 3v°], « Or d’ou pourriez vous estimer… » devient « D’ou estimeriez-vous… »). Le livre reste folioté ; l’ordre des planches ne suit pas les corrections de 1619 et l’on retrouve les deux types de feuilles destinées au chapiteau corinthien. L’éditeur réutilise des planches originales du Premier tome de Philibert De l’Orme : la gravure représentant « l’architecte prudent » (f. 51v°) est reprise pour la page de titre et le modèle de fenêtre inséré entre les folios 264 et 265 sert de cadre, en fin d’ouvrage, au sonnet « Aux Architectes français ».
Signe d’un « exil provincial », comme le dit Jean-Marie Pérouse de Montclos à propos de l’édition de Philibert De l’Orme sortie en 1648 des presses du même Ferrand ? Cette édition de Bullant semble pourtant avoir connu un certain succès si l’on en juge d’après le nombre d’exemplaires conservés aujourd’hui à la Bibliothèque nationale de France : c’est en effet la version de la Reigle qui y est la mieux représentée.

Yves Pauwels (Cesr, Tours) – 2006

 

Bibliographie critique

D. Ferrand, La Muse Normande, Rouen, Société rouennaise des bibliophiles, 1891-1894. 5 vol.

F.-C. James, Jean Bullant. Recherches sur l’architecture française au XVIème siècle, Thèse de l’École Nationale de Chartes, 1968. Résumé dans École Nationale des Chartes, Positions de thèses, 1968, p. 101-109.

Y. Pauwels, « La fortune de la Reigle de Jean Bullant », Journal de la Renaissance, 3, 2005, p. 111-119.

J.-M. Pérouse de Montclos, « Les éditions des traités de Philibert De L’Orme au XVIIe siècle », J. Guillaume (éd.), Les Traités d’architecture à la Renaissance, Paris, Picard, 1988, p. 355-365.