LES LIVRES D’ARCHITECTURE
L’entrée lyonnaise de Henri II fut illustrée non seulement par La magnificence de la superbe et triumphante entrée de Maurice Scève, mais aussi par un livret en italien, La magnifica et triumphale entrata del Christianiss. Re di Francia, qui parut simultanément chez Guillaume Roville. Techniquement, la version italienne se distingue par l’emploi de caractères italiques et de culs-de-lampe originaux ; mais le jeu de lettrines et les planches sont identiques. L’auteur anonyme n’est connu que par les initiales F. M. qui signent la dédicace ; pour R. Cooper, il s’agit peut-être d’un marchand florentin établi à Lyon nommé Francesco Mazzei. Il a pris soin d’apporter quelques corrections ou précisions, expliquant que « Pierrencise » (Pierre Scize) signifie « Pietra taglata » parce que « ja altre volte fu incisa quella montagna, acio chel fium ditto Sona passasi per la Città di Lione » (f. D 3v°), ajoutant des détails sur les dimensions ou les couleurs du jeu de paume d’Ainay ou sur l’aspect des arbres et le costume des nymphes de la suite de Diane. Pour la Perspective du change, il remplace le nom de Troie par celui d’Athènes, et ce avec pertinence car l’anecdote de la rivalité entre Minerve et Neptune concerne bien la capitale de l’Attique (f. G 4). Il tente d’adapter le récit à un public italien, mentionnant par exemple la Porta Leoni de Vérone comme point de comparaison avec l’arc double du port Saint-Paul, évoquant à propos du jardin suspendu du temple d’Honneur et Vertu qu’il est fait « come gl’horti a Napoli sopra le case » (f. G 2), ajoutant à la description du port de l’archevêché une référence explicite au Belvédère que ne mentionne pas Scève : « un balcone sopra quello, à l’imitatione di Belvedere del iardino del Papa, fu edificata un altra tonda torre… Questo mezzo circulo era aperto in tre luoghi, & nel chiuso fra le colonne erano quatro nicchi, & in luogho ch’à Belvedere del Papa è il Teverone, Apoline, Laocoonte, Cleopatra & altri ; quivi erano quatro Dii marini cioe Palemone con un Timone in mano, Glauco, & Ino, & Proteo, & cosi anco come à Belvedere à una scala à lumaca nel fondo della quale è una Fontana… ». Peut-être l’auteur italien a-t-il vu l’arc antique de Vérone et les statues du palais de Jules II ; il a plus sûrement lu le Terzo libro dans lequel Serlio évoque les jardins de Naples, représente la Porta Leoni et décrit le Belvédère : « a i quai luoghi si va per le due porte, che si veggono ne i lati di questo mezo circolo, nel qual luogho vi sono molte belle statue : e fra l’altre il Laocoonte, lo Apoline, il Tevero, la Cleopatra, la Venere, il bellissimo torso di Hercole, e molte altre cose belle. » (1540, f. 146). Enfin, il remplace le bref résumé que Scève avait donné de la comédie offerte à la Reine par une description complète de la représentation. L’éditeur Roville destinait visiblement l’ouvrage à l’importante communauté italienne qui résidait alors à Lyon, et sans doute aussi à un public plus large, curieux outremonts des fastes de la nouvelle cour française. Yves Pauwels (Cesr, Tours) – 2010
Bibliographie critique
M. Scève, The Entry of Henri II into Lyon, September 1548. A Fac-simile with an Introduction by Richard Cooper, Medieval & Renaissance Texts & Studies, 160, Tempe, AZ, Medieval & Renaissance text & Studies, 1997.
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